La transformation des moyens de production et de diffusion rebat complètement les cartes du financement et de la circulation des oeuvres européennes. Elle remet au premier plan la préservation de la diversité culturelle en Europe, enjeu fondamental du projet de directive en cours d’adoption.
La préservation de la diversité culturelle repose sur un principe vertueux : quiconque tire profit d’un marché audiovisuel doit contribuer au financement d’oeuvres produites dans ce pays. C’est ce qui prévaut dans de nombreux pays européens qui s’appuient sur des systèmes d’obligations d’investissement et/ou taxes alimentant les différents fonds de soutien.
Ce dispositif est le coeur du système permettant d’asseoir le développement d’oeuvres dans les langues nationales, mais aussi d’oeuvres européennes issues de coproductions avec d’autres pays européens. Pour assurer une compétition équitable et une performance optimale, ce principe a vocation à s’appliquer à tous les services qui ciblent un territoire, pas seulement à ceux qui y sont installés. Pour faire en sorte que la loi nationale s’adresse à tous les services audiovisuels qui tirent profit du marché national, il faut que ce soit les règles en vigueur dans le pays ciblé par le service qui s’appliquent.
Une directive européenne en discussion actuellement a déjà permis de dégager un consensus pour rendre ce principe du pays ciblé applicable à tous les services de vidéo à la demande. Des opérateurs comme Netflix ou Amazon, installés hors du territoire, ne pourront alors plus échapper aux dispositifs réglementaires de chaque pays dans lesquels ils proposent leurs services, et le marché sera alors pleinement équitable entre tous les services concurrents. Sur une initiative irlandaise, soutenue avec force par la France, l’idée qu’il fallait étendre ce principe à tous les services de télévision afin de ne pas créer de distorsion de concurrence entre deux types d’opérateurs de plus en plus proches est désormais soutenue par une quinzaine d’États membres.
Mais alors que l’Europe s’apprête par ce texte à faire un pas important pour la défense de la création européenne, d’incroyables résistances au Parlement européen et de la Commission européenne se font sentir quand il s’agit d’assurer le même traitement aux services à la demande et services de télévision. L’extension primordiale du principe du pays ciblé aux chaînes de télévision est loin d’être acquis. Il est pourtant crucial.
Par ailleurs, le contrôle du respect de ce principe de pays ciblé est, à ce stade des discussions, encore aux mains du pays d’origine. En clair, une plateforme basée, par exemple, aux Pays Bas devra donc respecter la réglementation française en matière de contributions à la création, du moment où elle dégage de la valeur grâce aux citoyens/abonnés français ; mais ce sont les Pays-°©‐Bas qui seront en charge de vérifier si ces obligations sont bien remplies. Cela n’a évidemment aucun sens et il s’agit là de garantir l’efficacité même de la Directive.
Les organisations professionnelles alertent sur le grave danger que représenterait un texte qui ne ferait que la moitié du chemin, laissant tout le secteur audiovisuel à la merci de groupes faisant leur marché parmi les dispositifs réglementaires pour s’installer dans le pays le moins disant pour cibler un ou plusieurs autres marchés. Laisser ces brèches pernicieuses dans la loi européenne serait une faute et ne ferait d’abord qu’une victime : la création audiovisuelle européenne. Les efforts français pour convaincre d’adopter cette extension et cette clarification sont à la mesure du rendez-°©‐vous important créé avec ce projet de texte. Les organisations d’auteurs et de producteurs français réunies dans ce communiqué tiennent à rappeler leur soutien total au Gouvernement et aux parlementaires français et à leurs partenaires européens qui font de cette extension un point essentiel du texte envisagé.
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